Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Pump Up the Culture

Pump Up the Culture

Loge de la fiction


Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Publié par Woodrow sur 14 Novembre 2012, 11:28am

Catégories : #Kevin Smith, #Apatow, #John Hughes

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Célébré à l’aube des années 2000 en tant que père d’un nouveau type de comédies que l’on pourrait qualifier de "pas vraiment romantiques" et intégrant  tout un pan de la pop-culture jusque-là ignoré par le genre en question, Judd Apatow est pourtant loin d’être le pionnier de cette comédie romantique parfois qualifiée hâtivement de « geek ». Son cinéma partage de nombreuses similitudes avec celui de son prédécesseur dans le domaine : Kevin Smith.

Entre trash irrévérencieux et sensibilité

Ce qui lie tout principalement ces deux metteurs en scène est leur propension à dépeindre des personnages et des schémas narratifs à deux facettes.Camouflés par des gags et situations visant plus ou moins en dessous de la ceinture qui parsèment leurs films, Smith et Apatow croquent en réalité leurs personnages avec une certaine tendresse  et une fibre beaucoup plus sensible cette fois-ci.

En témoigne dans Clerks 2 de Smith, comédie aux gags parfois référentiels et souvent scatos, derrière laquelle se cache une comédie romantique et bromantique 1, aux thèmes chers à Smith et principalement la question du passage à l’âge adulte avec tout ce que cela implique au niveau des responsabilités, des relations amoureuses etc…

 

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Clerks 2 : un film où il est question d'amour...

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

...d'amitié...

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

...et «d’érotisme inter-espèces »

 

C’est ainsi qu’au sein d’un même film peuvent se côtoyer des séquences, de pures comédies, opposant des fans de la saga Star Wars à celle du Seigneur des Anneaux, à des séquences plus graves ou touchantes comme toute la déclaration finale du personnage de Randall (Jeff Albertson) sur son amitié avec Dante (Brian O'Halloran).

Un aspect quasi-paradoxal de son cinéma qui se retrouvait déjà dans ses films antérieurs (et antérieurs à ceux d’Apatow) comme Mallrats (retitré honteusement Les Glandeurs au pays des Ch’tis) et Chasing Amy.

Ce seront des thématiques et un traitement jouant sur cette opposition de tons, qu’Apatow reprendra à son compte, principalement dans ses deux premiers films : 40 ans toujours puceau et En cloque mode d’emploi.

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Dans ce dernier, Ben (Seth Rogen) est un jeune adulte refusant de grandir, vivant en colocation avec ses amis avec lesquels ils passent son temps à fumer de l’herbe ou à mettre sur pied leur site internet fonctionnant sur le même principe que Mr Skin², qui va se retrouver par les circonstances à devoir se responsabiliser et assumer son nouveau rôle de père. Ce changement progressif du personnage amènera également à un changement graduel dans le ton du film. Les scènes comiques laissant peu à peu place, tout en restant présentes plus ponctuellement, à des séquences cette fois-ci beaucoup plus sérieuses car purement émotionnelles.

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

C’est donc que bien plus tard dans le long-métrage que la comédie ne sera plus obligatoirement de mise et qu’Apatow mettra en avant ses personnages sous un angle beaucoup moins drôle cette fois-ci pour en exposer leurs failles. Et quand Apatow fait perdurer l’humour  dans ces séquences au ton résolument plus grave, ce n’est que pour souligner encore plus le pathétique des situations et de certaines bassesses humaines.

D'ailleurs ce constant entre-deux entre humour grivois et "morale douce-amère" contrastant avec leurs atours trash plus évidents, est bien souvent la source de reproches à l'encontre de Smith et Apatow, désignés comme étant au final très conservateurs ou moralisateurs, cachés derrière leur humour grivois (alors qu'il serait plus juste de les qualifier de moralistes, ce qui est très différent, mais j'y reviendrais sûrement dans un futur article).

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Au final il sera étonnant de voir Père et fille et Funny People, respectivement films de Smith et d’Apatow, désignés comme étant les œuvres de la maturité de leurs auteurs, quand bien même leur démarche sur ces deux long-métrages ne se démarque en rien de leurs précédents films. Tout juste mettent-ils quelque peu la pédale douce sur un certain humour « régressif », qui reste quand même bien présent dans ces deux films.

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Deux films singuliers au sein de leur filmographie respective ? Vraiment ?

 

A noter que Kevin Smith fera tourné Seth Rogen, un des acteurs fétiches de Judd Apatow, dans Zack & Miri font un porno. Une certaine manière pour lui d’approuver et de boucler la boucle de la filiation qu’entretient le réalisateur de Funny People avec son propre cinéma.

 

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Un maître spirituel commun : John Hughes

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Ces similitudes entre ces deux cinéastes n’est pas fortuite, les deux ayant déclaré la même admiration pour le maître de la comédie américaine des années 80  John Hughes, et en particulier d’un film moins populaire que son mythique Breakfast Club : She’s having a baby, film matriciel d’une certaine façon de Père et Fille et d’En Cloque mode d’emploi.

C’est en grande partie de cette filiation avec la filmographie de l’auteur de Breakfast Club que vient cet attrait d’Apatow et Smith pour ce mélange de tonalités.

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Pour preuve, le pic émotionnel de Breakfast Club (mettant en scène la confession poignante de chacun des personnages quant à la pression scolaire et sociale qu’ils subissent au quotidien dans leur lycée) qui est précédé de moins de 10 minutes, par une scène de comédie voyant les mêmes personnages fumer de la marijuana, et est suivie par une séquence musicale où chacun se met à danser, pour certains de manière totalement chaotique et loufoque.

 

Kevin Smith : le Judd Apatow avant l'heure

Le mélange de tons, déjà présent chez Hughes

 

Des ruptures de ton présentes également dans un Ticket pour deux (dont le pitch fait d’ailleurs furieusement penser, avec 20 ans d’avance, au Date Limite de Todd Philips) pures comédies à tendance cartoonesque pendant une bonne partie du film, qu’un dernier acte viendra chambouler radicalement…

Les prémices de la méthode Smith et Apatow en somme !

1 Mot valise fusionnant « brother » et « romantique » : se dit d’une comédie reprenant certains codes de la comédie romantique pour l’appliquer à une histoire d’amitié entre de deux hommes.

2Site Internet répertoriant les séquences de nudité dans les films

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Articles récents